Peut-on mobiliser nos émotions pour le meilleur ?
Si on comprend mieux ce qui provoque nos émotions, on tente de mieux les contrôler, nous pouvons les mettre au service d’objectifs précis, par exemple l’éducation.
Le cerveau humain est l’objet le plus complexe que nous connaissions. Pourtant nous commençons à en comprendre le fonctionnement et en particulier ce qui régit nos émotions et les conséquences de celles-ci sur nos comportements, nos choix, nos décisions individuelles et collectives. Au centre de cet organe, en-dessous du cortex, il y a une zone qu’on appelle le striatum. Ce striatum nous donne du plaisir en libérant une molécule dont on entend de plus en plus parler: la dopamine. Les mécanismes dopaminiques sont particulièrement médiatisés depuis quelque temps car on sait qu’il rentre en jeu dans de nombreuses addictions, dont celles liés à la consommation numérique.
Comme l’explique Sébastien Bohler, journaliste scientifique et auteur du “bug humain” précise que “le striatum est particulièrement sollicité quand on amasse des informations intéressantes sur notre environnement. Le striatum adore l’information parce que c’était le premier gage de survie pour nos ancêtres. Vous preniez un homme du paléolithique dans la savane, son cerveau était happé par la moindre brindille écrasée signalant le passage d’un animal, une empreinte dans la boue, une paire d’yeux derrière un buisson, un nuage présageant un orage. Parce que détecter un prédateur ou une proie était crucial pour survivre et transmettre ses gènes. Si le striatum n’avait pas été super intéressé par les informations présentes dans son environnement, nous ne serions pas là. Mais notre striatum pense toujours à faire le moins d’efforts possibles. Là encore, logique de survie: pendant des millions d’années, celui qui arrivait à minimiser ses dépenses énergétiques tout en maximisant ses entrées, avait plus de chances de survie que ses voisins. Nous avons développé un régulateur très fin qui optimise à tout instant le rapport entre efforts et bénéfices, en minimisant les premiers et en maximisant les seconds. Notre striatum adore le statut social, il nous récompense avec de la dopamine à chaque fois que nous nous hissons dans la hiérarchie de notre groupe d’une façon ou d’une autre. Enfin, il s’habitue vite et a besoin de pics de plus en plus importants pour être ′satisfait’. Autrement dit nous devenons dépendants de doses croissantes de dopamine que nous tentons de chercher à moindre effort…”
Dans un monde où information, statut social, accès à la nourriture riche en sucre et en gras, bref à tout ce qui satisfait notre striatum est accessible à portée de clic, il est urgent de prendre conscience de notre dépendance et de mieux contrôler notre striatum. Plusieurs solutions sont possibles pour sortir des boucles quotidiennes de dopamine. C’est une urgence vitale car ces boucles ont des conséquences catastrophiques sur notre consommation et donc sur l’environnement, le climat, la planète. Si on comprend mieux ce qui provoque nos émotions, on tente de mieux les contrôler, nous pouvons les mettre au service d’objectifs précis, par exemple l’éducation.
Retrouvez l’intégralité de l’interview de Sébastien Bohler dans le podcast ”le monde qui vient en questions” sur le site de Boma France.
Publié le 18/6 sur Le HuffPost.